mardi 19 juillet 2011

Les effets pervers des primaires

L'objectif des élections primaires est tout à fait louable puisqu'il est donné aux Français de choisir "leur candidat" qui va se présenter à l'élection présidentielle.
Mais ces élections avant l'heure, ont aussi des effets pervers.
On a vu le résultat chez les Verts, EELV, où, à la grande surprise, c'est Eva Joly qui a été choisie par les militants pour les représenter à l'élection présidentielle. A peine élue, son adversaire politique Nicolas Hulot ne s'est plus montré depuis, amèrement déçu, car au fond de lui, il était persuadé qu'il allait les gagner. Et maintenant, on va lui demander de soutenir celle qui a été son adversaire avec laquelle les différences de points de vue politiques étaient marquées. Je ne serais pas étonné que NH aille à la pêche et décide de reprendre ses activités premières. Les primaires lui auront au moins permis de comprendre à ses dépends qu'il ne suffit pas d'avoir de bonnes idées et que la politique n'est pas donné à tout le monde !
Du coup, Eva Joly s'est sentie pousser des ailes et à peine élue vient de sortir une grosse connerie avec la suppression du défilé militaire du 14 juillet.
Du coté des socialistes, où le nombre de candidats est passé à 6, les rivalités sont encore plus fortes. J'attends de voir comment les candidats malheureux vont réagir à leur déception de n'avoir pas été choisi par les Français. Entre Martine Aubry et Ségolène Royal, c'est connu, c'est "je t'aime, moi non plus". Depuis longtemps persiste une vieille rancune datant de l'année où Martine a été préférée à sa rivale pour devenir Première Secrétaire du parti socialiste. A cette époque, Mme Royal avait bien cru qu'en devenant première secrétaire du parti, la moitié du chemin était déjà fait. Or, avec les primaires, une fois que le candidat(e) sera élu(e), il faudra bien mobiliser tout ce beau monde pour les rassembler autour des idées socialistes. Et là, je reste sceptique. Pour deux raisons majeures :
- La première, trop d'énergie aura été dépensée ces derniers temps pour que chacun des candidats présente ses idées, trouve des alliés, des rivalités vont s'établir voire se renforcer. Ces élections primaires divisent au lieu de rassembler. Elle révèle aussi au grand jour les différences entre les socialistes que les autres partis, l'UMP notamment, ne vont pas manquer d'exploiter. Mais il sera bien trop tard avant de se rendre compte que ces élections primaires étaient un mauvais choix.
- La seconde raison est bien plus grave : il aurait mieux valu, en effet, que toute cette énergie dépensée et surtout tout ce temps passé aient été utilisé depuis fort longtemps à rassembler toute la gauche, toutes tendances confondues, dans un seul et même objectif : gagner l'élection présidentielle. Les primaires ne font que perdre du temps, un temps précieux qui risque de manquer, et d'attiser les rivalités internes, que l'on ne pourra pas d'un coup de baguette magique faire disparaître. Et ce n'est que le début !
Le programme de la gauche socialiste uni n'est toujours pas connu. Quelques grandes lignes ont été avancées mais rien n'a été chiffré. Les socialistes s'appuient beaucoup sur l'Etat-providence mais celui-ci est au bout du rouleau ! Comment envisagent-ils de financer leur programme lorsque l'économie française est au plus bas : peu de croissance, un commerce extérieur avec un déficit record, un chômage qui ne baisse pas franchement surtout chez les jeunes, une inflation menaçante. Quelle est l'ampleur réelle du déficit public, de la dette publique et du déficit de la Sécurité sociale ? Personne ne nous dit la vérité, ni comment nous allons nous y prendre.
On se rappelle combien il avait été difficile pour François Mitterrand à rédiger avec les communistes le fameux "programme commun", alors qu'il était candidat, un candidat expérimenté. Des mois, des années de débats, de palabres avaient été nécessaires.
Et là, cette fois-ci, les socialistes s'imaginent qu'en trois ou quatre mois ils vont pouvoir créer les conditions d'un vrai rassemblement. Ils sont vraiment trop optimistes ! Ils l'avaient déjà été en 2002 avec Lionel Jospin !
Les Français n'en ont que faire de ces élections primaires. J'ai bien le sentiment que tout ça est voué à l'échec.
Nicolas Sarkozy va à nouveau remporter ces élections. Un scénario tout à fait plausible. Déjà avant lui, Mitterrand et Chirac avaient effectué deux mandats consécutifs, alors que les sondages étaient au plus bas pour l'un et l'autre. On connait le dicton. N'en déplaise à tout ces Français qui attendent l'alternance avec beaucoup d'impatience.
Afin d'être à la hauteur de la lourde tâche de gouverner la France dans les moments les plus difficiles, il faudra être très fort, convaincant et vite oublier toutes ces petites querelles qu'auront révélé ces primaires. Sans une coalition forte et durable de toute la gauche, ils n'ont aucune chance. J'ai bien peur qu'il ne soit déjà trop tard.
C'est pourquoi je persiste à penser que ces élections primaires sont inutiles et néfastes. Au final c'est une mauvaise stratégie.