vendredi 17 octobre 2008

En mémoire de Paul, mon meilleur ami, disparu.♦

Qu'elle peut être cruelle, la vie, lorsqu'elle nous prive à jamais de la personne que l'on a aimé.
C'est très basique ce que je dis, mais c'est dans ces moments-là qu'elle nous le fait sentir si tenté qu'on l'aurait oublié.

Paul était un ami fidèle, intelligent et timide à la fois, bien dans sa peau. Toujours de bonne humeur, un très bon caractère faisaient qu'il était apprécié de tous. Il avait un sens aigu des valeurs, en particulier le sens de l'amitié. Il aimait partager son temps libre avec ses amis avec lesquels il adorait rire. J'ai encore en mémoire le fous rires de Paul, lorsque nous étions entre amis à nous raconter des histoires drôles. Il en avait parfois les larmes aux yeux. C'était des moments de pur bonheur.

Plus tard, une fois mariés et que nous avions mené notre vie de famille chacun de son coté, nous avions eu peu d'occasions de nous rencontrer. Lui à Paris et moi à F., la distance qui nous séparait était bien longue pour se voir régulièrement.
Bien que ne l'ayant revu que trop rarement, à mon grand regret, il aura tout de même marqué une partie de ma jeunesse. Car avec lui, nous nous entendions comme des frères. Nous avions partagés beaucoup de moments de joies, de peine aussi. L'insouciance nous habitait, la croyance dans l'avenir et dans un monde meilleur nous rendaient optimiste. Nous étions tous les deux sur le même chemin. Il aimait la musique et le sport, moi aussi, et nous nous trouvions beaucoup de points communs.

Des années inoubliables de vie d'étudiants passées ensemble. Après le Bac en 69, avec d'autres amis de notre classe, nous étions partis à Strasbourg. C'était là qu'il avait réussi sa maîtrise de math-info pendant que moi, je finissais ma maîtrise en éco-gestion.

Une fois les études terminées, suivait une année particulièrement difficile où nous étions confrontés à la dure réalité du marché du travail. Une partie de nos rêves d'enfants s'est écroulée. D'étudiants joyeux, heureux d'avoir réussi nos études, nous commencions à douter. Les lettres pour trouver notre premier emploi se suivaient et se ressemblaient. Beaucoup d'entre elles n'ont jamais eu de réponses. Cette année-là, nous nous voyions pratiquement tous les jours, pour nous consoler mutuellement et nous donner du courage de continuer.

Chacun finit par trouver sa voie, lui comme ingénieur informaticien à la Société générale à Paris et moi, à exercer le métier d'enseignant. De longues années sont passées sans nous voir ni nous téléphoner. Ainsi va la vie.

Puis un jour de mai 2006, il faisait très beau, Anne-Marie, sa soeur, me téléphone pour m'annoncer la triste nouvelle. Paul avait 55 ans.

Je garderai de lui l'immense amitié née entre nous et cette période de notre jeunesse dont on ne mesure que plus tard l'importance qu'elle a eu dans notre vie.

Il est entré profondément dans mon coeur et je ne l'oublierai jamais.

Adieu Paul, adieu mon ami.

Claudi, 14 octobre 2008.

jeudi 31 juillet 2008

Histoire d'une statue en plâtre

Au retour de l'exode en Charentes, dans sa petite maison en ruine, Rose avait retrouvé sa statue de la Vierge Marie. Elle avait dû l'abandonner en 1940 avec tous ses biens au moment de l'invasion allemande.
Dans la cave, au milieu des gravas et de la poussière, elle l'avait retrouvée, à l'endroit même où elle l'avait cachée avant de partir. Un miracle qu'elle était encore là, en si bon état. Elle y tenait beaucoup car c'était un cadeau de sa mère qui fut très croyante.
Depuis son retour au pays, elle lui avait voué une grande ferveur et une immense dévotion. Dans sa salle à manger où elle l'avait posée, elle l'a prié tous les jours. Persuadée que, grâce à la Vierge Marie, son fils unique engagé au front comme jeune soldat et son mari Louis en sont sortis indemnes. Célibataire, son fils alcoolique n'a pas hélas survécu à son vice peut-être trop marqué par les atrocités de la guerre.
Louis, contrairement à son fils, a eu beaucoup plus de chances dans sa vie. Il a fait la grande guerre puis la seconde guerre mondiale où il était devenu sergent-chef. Plusieurs fois décoré pour ses services rendus à la France, Ancien combattant, il était de toutes les manifestations. Comme Rose, il était aussi croyant et ne ratait jamais une messe à l'église de son village. Et pour cause, il y chantait avec la Chorale Sainte Cécile, dont il était devenu le plus ancien membre. Elle lui avait rendu hommage pour ses 60 ans de fidélité et l'avait remercié pour sa gentillesse et son humanisme. Une longue vie qu'il a partagée avec son épouse avec laquelle il a encore fêté ses noces de diamant avant de disparaître quelques années plus tard.
Pour Rose, la voilà désormais seule, le coeur brisé par la solitude et la souffrance de sa maladie. Par un beau jour de juillet, à bout de force, elle s'est éteinte en laissant son héritage à Angèle, sa soeur cadette.
Célibataire, habituée à vivre seule, Angèle avait une santé précaire. Très fière de récupérer la statue qui avait une grande valeur sentimentale, elle s'est pourtant résignée à s'en séparer, car elle était trop chargée de souvenirs. Un jour, elle a du être hospitalisée pour avoir fait une mauvaise chute liée à ses fréquents vertiges. Son médecin, vu son âge et son état de santé, avait réussi à la convaincre de s'installer dans une maison de retraite. Contre mauvaise fortune bon coeur, elle avait accepté, car elle savait bien qu'elle n'avait plus vraiment le choix. Elle finit aussi par vendre sa maison et tous ses effets mobiliers.
Entre-temps, la statue de 48 cm a été mise en vente sur un site de ventes aux enchères. A peine publiée, elle a trouvé preneur dans la demi-journée qui a suivi sa publication. Deux photos accompagnaient l'annonce, dont une représentait le visage de la Vierge en gros plan. Ce visage était intact, ne comportait ni fissure ni éclaboussure, pour un objet en plâtre qui avait plus de cents ans.
Son acquéreur, un jeune homme, originaire du pays de Lourdes, cela ne s'invente pas, l'avait acheté sans hésitation. Il avait ressenti, disait-il, quelque chose de très fort à la vue de ce visage qui n'était pourtant qu'une photo, un effet qu'aucune autre statue semblable ne lui avait jamais produit. On dit souvent, que les objets ont une âme ...
Finalement, elle n'aurait pas pu tomber entre de meilleures mains. Une statue en plâtre décidément pas comme les autres. Choyée, protégée, vénérée, une chance incroyable qu'à ce jour, elle soit encore intacte et si bien conservée.
C'est ainsi que s'achève cette petite histoire émouvante et celle d'une statue à laquelle on voudrait souhaiter une vie éternelle.
Nous avons tous au fond de nous-même une statue virtuelle bien vivante d'une personne, d'un ange-gardien, d'un Dieu que nous vénérons et prions pour nous accompagner dans notre vie et nous protéger.


mardi 24 juin 2008

Quel jour sommes-nous ?

Voilà quelques jours que j'ai fini de corriger les copies du Bac. Assis devant mon écran d'ordinateur, je me rend compte que nous sommes déjà le 20 juin. Une date importante pour moi, et pour cause, c'est le jour de l'anniversaire de ma fille. Je calcule rapidement, 26 ans. Mon portable à la main, je laisse un message à Nath, et pour être sûr qu'elle le reçoit je lui envoie un mail. Ouf, j'ai failli le louper. Ma mémoire est comme une passoire, à l'instant j'y pense, deux minutes après j'ai déjà oublié. Deux ou trois jours sont passés, pas de réponse. Les enfants sont très réalistes. Ils ne viennent à vous que lorsqu'ils ont besoin de vous. Autrement, je n'existe pas. Ce n'est pas grave, j'y suis habitué. Je quitte mon bureau pour aller faire quelques courses. Il faut bien manger quelque chose.

samedi 1 mars 2008

Souvenir quand tu me tiens

J’habite une jolie maison dans un petit village. Ma femme et moi nous vivions paisiblement avec nos deux enfants et nous étions heureux. Une famille sans histoire.
Dans le jardin fleuri, je les voie encore courir après le ballon, patauger dans la petite piscine alors que moi, installé sur la terrasse, je les observais un livre à la main. Mon épouse pendant ce temps préparait le dîner ou s'occupait des tâches ménagères.
Vingt années de ma vie consacrées à ma famille, à mes enfants, vingt années de pur bonheur. J’en oubliais presque que j’existais. Mes amis, je les voyais de temps en temps, à l'occasion des communions de nos enfants respectifs, et petit à petit, nos chemins se sont éloignés et nous avions perdu le contact.
Puis un jour, la foudre s’est abattue dans notre vie tranquille
: le divorce, le partage des biens, des épreuves douloureuses que jamais, oh grand Dieu, je ne me serais imaginé possible.
Mais la vie est ainsi faite, quelquefois cruelle quand elle vous prend par surprise.
J'ai dû faire des erreurs, comme tout le monde, mais je n'arrive pas à savoir où et quand. Finalement, ça n'a plus d'importance aujourd'hui. Les dés sont jetés et j'ai beaucoup perdu.
Mon cœur est maintenant brisé, ma vie quelque-part aussi.
Rien n'est plus comme avant. Les enfants sont grands et chacun vit de son côté.
En peu de temps, j’ai pris un sacré coup de vieux. La page n'est pas encore tout à fait tournée.
Je travaille inlassablement à me reconstruire pour me refaire une nouvelle vie. Mais à mon âge et avec le caractère et le tempérament qui sont les miens, ce n'est pas si simple ...